Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Pourquoi ce blog?

Chroniques libres et dessins sur les lieux, les villes, les gens, la famille.

Recherche

Archives

Articles RÉCents

16 septembre 2006 6 16 /09 /septembre /2006 10:21

Le ciel soudain s'est obscurci. Comprenez bien, ils m'obligent à partir. J'avais un lieu dans le monde, je l'occupais, des gens venaient me rendre visite, j'avais d'ailleurs une carte de visite, mon nom était marqué dessus, comme cela les gens savaient qui j'étais, où ils pouvaient me trouver, me téléphoner, me faxer, me mailer, une secréaire pour prendre rendez-vous. Cela est fini. il ne s'est rien passé de particulier, si ce n'est que ma carte de visite n'est plus valable, puisque ce n'est plus mon titre qui est dessus. Je quitte la ville, une belle ville, historique, européenne, tout ça; je viens, je reviens, sur Paris, je prends des rendez-vous, les gens me reçoivent gentiment, me parle d'eux, de leurs problèmes, de leurs projets, me posent quelques questions. Je prends le RER, je prends le bus, je prends le métro, je prends la voiture, je vais de l'Odéon à Saint Denis, de la Défense à Créteil, je raconte mon histoire, ma vie, mon expérience, mon savoir-faire, mes souhaits, mes possibilités.

Paris est comme un espace de jeu, partout des images, des sigles, des fléches, des sens obligatoires, des sens interdits, des panneaux que je ne comprends pas,  non, non, je ne suis pas étranger, je parle français, la preuve, j'écris ce texte, mais des fois, les panneaux n'expriment plus rien, ils ont leurs lettres, leurs chiffres, leurs signes, mais le sens est perdu, je ne suis pas Champollion, comment déchiffer tout cela, il y en a trop. J'interroge quelqu'un, a-t-il compris? il me répond qu'il ne comprend pas le français, qu'il n'est pas du coin, qu'il ne sait pas, ou bien il me dit n'importe quoi, pour se débarrasser. Je repars, me cogne, rebondit, je suis entraîné dans le flux, je m'en extrais pour faire le point, il y a juste ces panneaux que je ne comprends plus, et le temps qui tourne, et les rendez-vous qui doivent être ponctuels, tout le monde s'en fout que j'arrive en avance ou en retard, et pourtant, la petit bille doit bien arriver sur le flipper pour marquer des points, ils s'afficheront en couleur sur les toits des immeubles, les gens pourront voir mon score, si je gagne une partie gratuite, ou si tout s'arrête game over, je recherche une nouvelle impulsion, un nouveau but, une  nouvelle rencontre qui me fera trouver la personne qui me dira OK, c'est bon, on travaille ensemble, mais pour le moment je suis dans Paris, je suis sous Paris, je suis à travers Paris, je prends ma respiration au Louvre, je pars en apnée, je retrouve mon souffle à la Grande arche, le ciel au travers du grand carré, et ce nuage qui flotte entre, je prends l'air au sens premier, comme on prend dans ses mains, dans ses bras, et je replonge, non, je n'ai pas de casque, je n'ai pas de tuba, ni de palme, ni de bouteille, je suis un artisan, un solitaire, un aventurier à l'ancienne mode, j'ai à peine un plan, pas de boussole, le soleil parfois quand il est là, on peut repérer le sud, alors Paris tourne sur lui-même, se remet en ordre, les ombres sont des signes, on sait mieux où aller, simplement parce que l'on n'est plus obligé de suivre les panneaux, la  boule quitte le flipper, elle prend sa liberté, on pourrait presque s'élever dans les airs pour mieux se repérer, et tant qu'on y est, monter encore, dépasser la tour Eiffel, et voir les immeubles rapetisser, la Seine devenir un lacet, monter dans un formidable zoom arrière, flotter, partir.

La nuit tombe sur Paris ; Paris s'éclaire, Paris s'illumine, le flipper se met à clignoter de tous côtés, les feux, les enseignes, les publicités, les annonces, les éclats de la tour Eiffel à chaque heure qui sonne, et toujours ma petite bille qui tourne, et tourne encore, mais que l'on ne voit plus, qui va se perdre dans la nuit, que plus personne ne suit, qui s'enfonce dans l'obscurité, la bille qui tourne dans la tête aussi, l'insomnie qui vous tarraude, l'attente du petit jour, du prochain jour, pour que cela recommence, pour que cela finisse!

Partager cet article
Repost0

commentaires