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Chroniques libres et dessins sur les lieux, les villes, les gens, la famille.

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16 décembre 2006 6 16 /12 /décembre /2006 13:52
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27 novembre 2006 1 27 /11 /novembre /2006 15:37

 Quitter l'HAFRABA, l'autoroute Hambourg-Frankfurt-Bâle juste avant de devoir s'engager sur l'autoroute suisse, et prendre la direction Weil-am-Rhein. Sur une plaine dénudée se dresse une architecture torturée, exubérante, dynamique, libérée. Mais petite, comme un jeu que l'on aurait autorisé sur un seul bâtiment (les autres ressemblent à tous les bâtiments d'usine contemporains). Maintenant que les esprits se sont habitués au musée Guggenheim de Bilbao, à la complexité de ses formes (même si l'organisation fonctionnelle en est rigoureuse), tout autre bâtiment de Gehry apparaît comme un essai, ou un rejeton, ou une copie d'élève. J'eus cette impression avec l'American Center, avant qu'il ne devienne la nouvelle cinémathèque de Bercy: il était le premier exemple de l'architecture de Gehry que je fréquentais de près, mes bureaux étant à l'époque juste en face; et puis il perdit brusquement de son originalité quand le déferlement médiatique de Bilbao se mit en mouvement, il devint un bâtiment bien sage, qui se salissait doucement. Heureusement il fut nettoyé et revit maintenant.

L'intérêt véritable est à l'intérieur : des expos de design, des sièges, des meubles, des luminaires. Je ne parlerai que de l'expo en cours sur Jean Prouvé, La poétique de l'objet technique, avec des maquettes, des originaux de mobilier, une présentation partielle de la maison qu'il a construit au Niger, des panneaux, des structures de métal. L'impression est très forte: recherche de la simplicité débouchant sur des conceptions minimalistes, persistance d'un artisanat qui prend son origine dans le métier de forgeron qu'exerça Prouvé, mais des matériaux qui résistent mal au temps, si on les compare au mobilier en bois du XVIIIe ou XIXe siècle. Et en même temps, une extraordinaire fraîcheur de la nouveauté, une adéquation avec l'époque, conceptuelle et novatrice, et en définitive une grande simplicité que l'on retrouve dans les propos de Prouvé, ou dans sa maison de Nancy.

La dernière fois que j'étais venu, c'était pour voir les lampes d'Ingo Maurer, aux légers froissements de papier...

Avant de partir, vous pouvez prendre une petite consommation à la caféteria en consultant des ouvrages sur le design, ou acheter une babiole sans intérêt à la boutique...

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10 novembre 2006 5 10 /11 /novembre /2006 13:56
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7 novembre 2006 2 07 /11 /novembre /2006 13:55
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5 novembre 2006 7 05 /11 /novembre /2006 23:02

Je dessine Michel BUTOR qui passe dans l'émission de Frédéric Fernet sur Arte le dimanche matin. Il a l'air guilleret malgré ses plus de quatre-vingt ans.
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17 octobre 2006 2 17 /10 /octobre /2006 09:09

 

(N.D.de la Dalbade, Toulouse)

L'appartement est au troisième étage. Ce sont des étages hauts, aux plafonds élevés (le déménageur fera sa blague habituelle en montant le piano: "Vous n'auriez pas pu jouer de l'harmonica?"). Le salon a une double orientation, avec un balcon d'angle, un gros balcon de pierre  aux lourdes colonnes, il est là pour marquer le coin, pour montrer que l'on est à l'étage noble, il essaie de se dégager des deux rues étroites qui l'enserrent, de se montrer à hauteur de toit, presque de vouloir dire qu'il pourrait dominer la ville.

Le soleil entre le matin sur la gauche, tourne au-dessus des toits, est à midi au droit du balcon, puis redescend sur l'autre versant. L'été tout est fermé tant la chaleur est intense, le soleil déjà haut quand il pénètre dans la pièce, les briques de la ville déjà brûlantes. Les mi-saison sont des merveilles, le soleil se glisse comme pour dire qu'il vient dire bonjour, la grande pièce reste illuminée la journée entière et le soir est une douceur chaude et rouge.

Je reste là des heures, sur une banquette, à lire, à somnoler, à rêver, à observer les ombres tourner dans la pièce.

Le soir est un enchantement. Les toits de la ville rose s'assombrissent. Les cheminées de la ville découpent le ciel comme pour en arracher des lambeaux. Le crépuscule un moment s'équilibre avec les lumières qui apparaissent. Un chat marche silencieusement sur la gouttière d'en face, tout près devant la fenêtre ouverte pour accuellir les premiers courants frais. Et quand la nuit cette fois prend véritablement possession de la ville, quand le ciel n'est plus qu'une lave bleue sombre, quand il faut allumer la lampe pour lire si l'on ne veut pas que l'épaisseur de la nuit envahisse aussi l'appartement, alors se produit une merveilleuse apparition. Insensiblement la grande rosace de la Dalbade s'éclaire. Les premières couleurs pâles s'affirment peu à peu pour éclater enfin, pour émerger de l'église comme pour s'échapper, pour se disperser dans la ville, pour l'illuminer, pour l'incendier. La rosace annule toutes les autres lumières, lampadaires falots, fenêtres hésitantes, phares tournoyants; et les étoiles se rétractent dans l'épaisseur de la nuit. Elle occupe maintenant le centre de l'appartement, s'encadre dans la fenêtre du balcon d'angle, inonde le sol de ses couleurs.  Le premier réflexe est de fermer les lumières, d'abandonner l'appartement tout entier à l'enchantement de la rosace, de la Dalbade.

La nuit se suffit maintenant dans cette contemplation, il faudra tenir les heures avant que la lune passe derrière les toits, que le jour ne pointe,  que la rosace pâlisse à son tour, puis s'éteigne sous un nouveau soleil.

Et qu'on entre dans une nouvelle attente du soir et de son illumination.

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13 octobre 2006 5 13 /10 /octobre /2006 21:47

La forêt, Max Ernst

C'est comme une forêt. De grands arbres noirs percés de soleil. Une pénombre montée de l'obscurité de la terre, qui s'étend comme une nappe de brouillard. Une lumière diffuse, sourde, dont on attend à chaque instant l'extinction. En trois pas toute orientation est perdue. On cherche en vain une raison de se diriger. Pourtant, tout près on voit bien l'arbre, son écorce  torturée, son fût dressé, ses branchages comme un bouquet de feu d'artifice figé dans la perte de la dernière fusée. L'arbre appelle la main, le toucher rassure, le tronc s'enfonce dans la terre, on aperçoit les racines qui réapparaissent un peu plus loin, l'ancrage paraît solide: c'est donc un point fixe, à partir duquel on peut construire une direction, un chemin, un départ, repérer un aute arbre, progresser, vers quoi? mais l'essentiel est de savoir que l'on est près de cet arbre là, unique, retrouvable. On comprend mieux les amants qui gravent leur nom sur les arbres auprès desquels ils ont échangé leurs baisers. Plus tard, ailleurs, rien ne sera plus jamais pareil. Et il faudra pourtant bien revenir à cet état là, à ce bonheur dont il ne reste plus que cette écorce à qui on a confié un secret dérisoire.

L'oeil se perd dans la futaie; aucun repère pour se diriger, si ce n'est l'arbre suivant. Pourtant là-bas, l'ombre a bougé; malgré l'absence de vent, il y a eu un mouvement de lumière. Une bête sûrement, un renard peut être. Pourquoi penser à un renard? Parce qu'il est malin? mais tous les animaux se déplacent dans la forêt  en sachant où ils vont. Un marcassin? la chose est dèjà plus conséquente; pourquoi n'est-on pas armé? Attente. Retrouver le calme de la forêt; attendre le prochain mouvement, la prochaine vibration, le prochain soubresaut. Ou un cri. On n'avait pas remarqué que la forêt était curieusement silencieuse. Cela vint d'un coup. Des cris aigus, répétés, et, tout près, l'herbe qui secouée par ce qui est à l'évidence une lutte. Ils étaient déjà là, à s'épier, à se toiser dans l'ombre, à se défier. L'attaque fut si brusque, si brève, si violente aussi, la mort si rapide, que le retour au calme est une nouvelle menace.

Il faut pourtant avancer, faire quelque chose, manger, dormir. Qui dans la forêt opaque, qui dans la ville immense sera la proie, sera le prédateur, sera l'observateur, sera le chasseur? Derrière chaque immeuble, dans chaque voiture, au coin de quelle rue la menace apparaîtra-t-elle? Dans la nuit qui s'avance les lampadaires tentent de repousser les ombres, de rassurer les proies, de dissuader les attaques. Les rêves s'encombrent de peurs inutiles. La nuit enferme l'obscurité pour mieux la circonscrire. Sur les immeubles de la ville, les signes se cherchent, les amoureux écrivent à la craie des repères pour se retrouver, pour orienter leur vie, pour maîtriser la ville, pour ne pas être une proie.

Mais rien n'est sûr.

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27 septembre 2006 3 27 /09 /septembre /2006 07:02

(photo de François Bon, pour Paysage fer)

Départ à 6h16, pour s'enfoncer immédiatement dans les masses noires des Vosges. L'arrêt à Saverne est comme une sombre pensée, inutile. A Sarrebourg, la nuit s'infléchit en un gris charbonneux qui repousse encore loin le jour. Pourtant le vert sombre d'un pré proposera la première couleur. Le paysage tentera de distinguer les nuances de gris et de vert, recouvert souvent d'une nappe de brouillard. L'informe envahit alors de nouveau tout dans l'état léthargique du jour en attente. Un léger infléchissement de la pente de la voie peut libérer à nouveau les masses noires des arbres, les clartés timides des champs. Une harmonie se cherche avec le velours des sièges aux larges bandes grises et vert pâle, où sommeillent les voyageurs.

Le monde s'établit peu à peu: une route lisse, avec sa bande blanche et quelques poteaux au virage; le reflet de bronze d'une rivière; le parallélipipède d'un bâtiment industriel accolé à la voie ferrée; le foisonnement de rails, poteaux, fils, wagons de marchandise à Blainville-Derrevillières, dans un élargissement brutal du paysage fer*, pour se resserrer aussitôt, ne laissant filer que deux voies annexes, envahies d'herbes; les bâtiments poussiéreux d'une plâtrerie; de nouveau une rivière, large et laiteuse au sortir d'un bief; des pavillons maintenant, serrés les uns contre les autres; une première file de voiture arrêtées au feu rouge. Dans le jour qui se lève enfin, le paysage s'encombre, les objets urbains s'accumulent, l'enseigne d'une station d'essence, des hangars immenses et délabrés, un panneau publicitaire annonçant le salon de l'érotisme les 5 et 6 octobre, des immeubles aux premières fenêtres éclairées, un appartement à vendre au troisième étage. Le train entre dans une ville: Nancy.

La montée des voyageurs brise le charme de la montée du jour. Au sortir de la ville, le brouillard reprendra le dessus, comme une régression, décourageant l'attention. Sur le bord de la voie, des reflets peuvent indiquer la présence d'un canal. Retour aux limbes d'un jour avorté.

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Le train avancera longtemps dans ce coton vaporeux. J'essaie de lire Extension du domaine de la lutte de Michel Houllebecq. Je ne sais pourquoi il me fait penser à la fin désabusée et assez lamentable de l'Education sentimentale, où les deux compères reconnaissent que, somme toute, c'est au bordel qu'ils eurent leurs meilleurs moments. Flatterie de la bassesse.

A une demi-heure de Paris, avec cette impression d'accélération, réelle ou fictive, qui accompagne l'approche de l'arrivée, le soleil envahit doucement le brouillard sans le dissiper tout à fait, mais en faisant remarquer que la saleté des vitres contribue largement à l'accentuation de la grisaille du matin. Les premières ombres nettes apparaissent, et le canal, revenu, s'agrémente de petits bateaux blancs. La banlieue envahit définitivement le paysage.

Nous arrivons à Paris. Il fera certainement beau aujourd'hui.

p.s.: je finirai Houllebecq dans le metro et donnerai le livre à ma voisine avant de descendre à la station Daumesnil.

*Paysage fer, de François Bon, éditions Verdier

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23 septembre 2006 6 23 /09 /septembre /2006 06:04

Les habitants de la petite ville de N. furent surpris le jour où apparut sur la grande place une cage. C'était une grande place, nue, au sol de terre battue, qui avait été il y longtemps une place d'armes, mais les habitants de N. étaient pacifiques et il n'y avait plus de garnison depuis longtemps. Peut-être avait-il eu une statue du roi, mais elle avait dû être enlevée à la révolution. Une arbre de la Liberté avait bien dû y être planté, comme ce fut un temps nécessaire, mais il n'était pas resté non plus. Depuis la place était vide, avec seulement une rangée d'arbres sur le côté, là où se mettaient les boulistes pour bénéficier de l'ombre, sauf le jeudi qui était marché. Quelques fois, l'été, un cirque y venait installer son chapiteau, un petit cirque, la place n'était pas si grande, et l'on vit un jour un éléphant faire le tour de la place en remuant sa trompe. Et puis bien sûr il y avait le bal du quatorze juillet, et la cérémonie du onze novembre, près du monument aux morts qui se touvrait dans un angle.

La cage était un cube d'environ un mètre cinquante de côté, avec des barreaux tous les trente centimètres. Un attroupement se fit, et les commentaires allèrent bon train. Le maire, informé, se déplaça immédiatement, et voulut la faire enlever. Les hommes du service de l'entretien ne purent la soulever; il semblait que les barreaux s'enfonçaient profondément dans le sol. La question grandissait: qui l'avait placée là, quand, par quel moyen était-elle arrimée aussi fortement. Et surtout, comme le clama un conseiler d'opposition (car l'affaire prit rapidement une tournure politique) , pourquoi? Le débat au conseil municipal fut houleux, le maire accusé d'une sombre machination. Il fit appel au gouvernement pour que des policiers fassent une enquête, mais ils ne trouvèrent aucun indice. La police posa des barrières autour de la cage, mais les habitants, qui avaient déjà pris l'habitude de se réunir près de la cage (et très vite les discussions portérent sur d'autres sujets), les enlevèrent. Et quand les ouvriers vinrent pour la découper au chalumeau, ils s'y opposèrent violemment. Un homme cria même que l'on portait atteinte au patrimoine de la ville, que la cage valait bien toutes ces statues contemporaines que les municipalités posent au milieu des ronds-points. Les hypothèses les plus absurdes furent émises: une femme assura que le diable en personne devait être dans la cage, et que le malheur s'abattrait sur la ville; un homme suggéra de la transformer en volière; un autre évoqua les fameuses geôles des Louis XI, où le prisonnier ne pouvait se tenir ni debout ni couché, et qui finissait tordu dans d'affreuses souffrances. Cette dernière idée, curieusement, fit son chemin. La ville de N. n'avait pas de prison, et d'ailleurs la criminalité y était très faible. Pourtant les gens qui se réunissaient chaque jour auprès de la cage commencèrent à se demander qui devrait être enfermé; il était difficile de discerner les vraies culpabilités des vengeances personnelles.

La rumeur envahit pourtant toute la ville qu'il fallait chercher le coupable qui méritait d' être ainsi soumis à l'opprobe générale. Des bien-pensants eurent beau argumenter que le cage était venue sans que l'on sache pourquoi et que ce n'était pas une raison, d'autres y voyait au contraire le signe d'une volonté divine à laquelle il fallait se soumettre. On trouva un coupable; il fut arrêté, jugé sommairement par un tribunal improvisé, et condamné à occuper la cage. C'est alors que l'on s'aperçut (pourquoi seulement maintenant? c'est étonnant), que la cage n'avait pas de porte, que l'on ne pouvait pas y entrer. La perplexité gagna la population. La cage ne pouvait donc pas servir de cage. Le trouble fut qrand tant l'idée de l'utilité, voire la nécessité de cette cage était maintenant ancré dans les esprits des habitants de la petite ville de N. La cage fut maudite, elle fut souillée, mais personne n'osa plus s'en approcher. Le coupable fut injurié et chassé de la ville.

La place devint déserte, les boulistes trouvèrent un autre terrain de jeu, et l'on mit le marché autour de l'église. Quelques mois plus tard, un jeune journaliste revint sur cette affaire et fit paraître un article qui disait en substance qu'en fait c'étaient peut être les habitants de la ville de N. qui étaient enfermés dans la cage, mais à l'extérieur. Il fut licencié du journal le lendemain.

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16 septembre 2006 6 16 /09 /septembre /2006 10:21

Le ciel soudain s'est obscurci. Comprenez bien, ils m'obligent à partir. J'avais un lieu dans le monde, je l'occupais, des gens venaient me rendre visite, j'avais d'ailleurs une carte de visite, mon nom était marqué dessus, comme cela les gens savaient qui j'étais, où ils pouvaient me trouver, me téléphoner, me faxer, me mailer, une secréaire pour prendre rendez-vous. Cela est fini. il ne s'est rien passé de particulier, si ce n'est que ma carte de visite n'est plus valable, puisque ce n'est plus mon titre qui est dessus. Je quitte la ville, une belle ville, historique, européenne, tout ça; je viens, je reviens, sur Paris, je prends des rendez-vous, les gens me reçoivent gentiment, me parle d'eux, de leurs problèmes, de leurs projets, me posent quelques questions. Je prends le RER, je prends le bus, je prends le métro, je prends la voiture, je vais de l'Odéon à Saint Denis, de la Défense à Créteil, je raconte mon histoire, ma vie, mon expérience, mon savoir-faire, mes souhaits, mes possibilités.

Paris est comme un espace de jeu, partout des images, des sigles, des fléches, des sens obligatoires, des sens interdits, des panneaux que je ne comprends pas,  non, non, je ne suis pas étranger, je parle français, la preuve, j'écris ce texte, mais des fois, les panneaux n'expriment plus rien, ils ont leurs lettres, leurs chiffres, leurs signes, mais le sens est perdu, je ne suis pas Champollion, comment déchiffer tout cela, il y en a trop. J'interroge quelqu'un, a-t-il compris? il me répond qu'il ne comprend pas le français, qu'il n'est pas du coin, qu'il ne sait pas, ou bien il me dit n'importe quoi, pour se débarrasser. Je repars, me cogne, rebondit, je suis entraîné dans le flux, je m'en extrais pour faire le point, il y a juste ces panneaux que je ne comprends plus, et le temps qui tourne, et les rendez-vous qui doivent être ponctuels, tout le monde s'en fout que j'arrive en avance ou en retard, et pourtant, la petit bille doit bien arriver sur le flipper pour marquer des points, ils s'afficheront en couleur sur les toits des immeubles, les gens pourront voir mon score, si je gagne une partie gratuite, ou si tout s'arrête game over, je recherche une nouvelle impulsion, un nouveau but, une  nouvelle rencontre qui me fera trouver la personne qui me dira OK, c'est bon, on travaille ensemble, mais pour le moment je suis dans Paris, je suis sous Paris, je suis à travers Paris, je prends ma respiration au Louvre, je pars en apnée, je retrouve mon souffle à la Grande arche, le ciel au travers du grand carré, et ce nuage qui flotte entre, je prends l'air au sens premier, comme on prend dans ses mains, dans ses bras, et je replonge, non, je n'ai pas de casque, je n'ai pas de tuba, ni de palme, ni de bouteille, je suis un artisan, un solitaire, un aventurier à l'ancienne mode, j'ai à peine un plan, pas de boussole, le soleil parfois quand il est là, on peut repérer le sud, alors Paris tourne sur lui-même, se remet en ordre, les ombres sont des signes, on sait mieux où aller, simplement parce que l'on n'est plus obligé de suivre les panneaux, la  boule quitte le flipper, elle prend sa liberté, on pourrait presque s'élever dans les airs pour mieux se repérer, et tant qu'on y est, monter encore, dépasser la tour Eiffel, et voir les immeubles rapetisser, la Seine devenir un lacet, monter dans un formidable zoom arrière, flotter, partir.

La nuit tombe sur Paris ; Paris s'éclaire, Paris s'illumine, le flipper se met à clignoter de tous côtés, les feux, les enseignes, les publicités, les annonces, les éclats de la tour Eiffel à chaque heure qui sonne, et toujours ma petite bille qui tourne, et tourne encore, mais que l'on ne voit plus, qui va se perdre dans la nuit, que plus personne ne suit, qui s'enfonce dans l'obscurité, la bille qui tourne dans la tête aussi, l'insomnie qui vous tarraude, l'attente du petit jour, du prochain jour, pour que cela recommence, pour que cela finisse!

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